[{"label":"Accueil","url":"https:\/\/www.pbo-dpb.ca\/fr"},{"label":"Publications","url":"https:\/\/www.pbo-dpb.ca\/fr\/publications"},{"label":"Incidence financi\u00e8re de l\u2019achat d\u2019Obligations hypoth\u00e9caires du Canada par le gouvernement","url":"https:\/\/www.pbo-dpb.ca\/fr\/publications\/RP-2526-014-S--fiscal-implications-government-purchase-canada-mortgage-bonds--incidence-financiere-achat-obligations-hypothecaires-canada-gouvernement"}]
Rapport

Incidence financière de l’achat d’Obligations hypothécaires du Canada par le gouvernement

Ce rapport contient un aperçu des répercussions financières de l’engagement du gouvernement à consacrer jusqu’à 30 milliards de dollars par année à l’achat d’Obligations hypothécaires du Canada.

Résumé

En février 2024, le gouvernement du Canada s’est mis à acheter des Obligations hypothécaires du Canada (OHC) pour honorer son engagement de consacrer un maximum de 30 milliards de dollars par année à l’achat de ces obligations. La limite d’achat représente la moitié de la valeur maximale des émissions annuelles (60 milliards de dollars). Au 30 septembre 2025, le gouvernement avait acheté pour 50,8 milliards de dollars d’OHC, ce qui représente 48,1 % de la quantité totale d’OHC émises depuis février 2024.

Par le passé, les OHC ont eu un rendement supérieur à celui des obligations du gouvernement du Canada de même durée. Cet écart permettait au gouvernement de faire des emprunts à des taux d’intérêt plus bas pour financer l’achat d’OHC, et donc de générer des revenus (nets) sans faire augmenter la dette publique nette. Or, depuis que le gouvernement a commencé à acheter des OHC en 2024, l’écart de rendement s’est rétréci, ce qui a fait baisser les revenus nets générés par les achats subséquents.

En nous fondant sur nos Perspectives économiques et financières de septembre 2025, nous avons fait l’analyse de divers scénarios d’écart de rendement pour estimer les revenus nets (ou les répercussions financières) à moyen terme que pourraient générer les achats d’OHC par le gouvernement. D’après les scénarios envisagés, on s’attend à ce que ces achats génèrent des revenus nets de 353,4 millions à 509,7 millions de dollars par année d’ici 2030-2031.

Bien que le gouvernement puisse augmenter la quantité de ses achats (soit en maintenant, soit en rehaussant le plafond des émissions obligataires) pour générer plus de revenus, les paramètres du programme ont été fixés à la suite de consultations auprès des opérateurs pour préserver l’intégrité du marché des OHC. Une expansion du programme pourrait ébranler la fonction des OHC comme mécanisme de gestion des risques fondé sur le marché.

On prévoit cependant que l’émission d’obligations supplémentaires pour financer l’achat d’OHC fera augmenter la dette publique brute de 30 milliards par année, pour un total de 179,3 milliards en 2030-2031. Ces obligations supplémentaires pourraient exercer une pression sur l’ensemble des coûts d’emprunt du gouvernement et faire diminuer ou disparaître les revenus nets provenant des achats d’OHC. Par ailleurs, comme le gouvernement utilise surtout des instruments d’emprunt à court terme (comme des bons du Trésor et des obligations à 2 ans) pour acheter des actifs de plus longues durées, il risque de payer des taux d’intérêt à court terme plus élevés qui pourraient faire diminuer ou disparaître les revenus nets provenant des achats d’OHC.

Achats d’OHC par le gouvernement

Dans l’Énoncé économique de l’automne 2023, le gouvernement a annoncé son intention d’acheter pour un maximum de 30 milliards de dollars d’OHC par année à compter de février 2024, et en outre de faire passer à 60 milliards la valeur annuelle maximale des émissions d’OHC[^1]. Au 30 septembre 2025, le gouvernement avait acheté pour 50,8 milliards de dollars d’OHC, soit près de la moitié de toutes les émissions d’OHC depuis février 2024. Cet investissement comprend 28,3 milliards pour des OHC à 5 ans et 22,5 milliards pour des OHC à 10 ans (voir la figure 1). On trouvera à l’annexe de l’information générale sur le processus de titrisation et les OHC.

01020304050602024 T12024 T22024 T32024 T42025 T12025 T22025 T3Obligations à 10 ansObligations à 5 ans
Portefeuille d’OHC à 5 ans et à 10 ans du gouvernement du Canada (en milliards de dollars)

Bureau du directeur parlementaire du budget et Société canadienne d’hypothèques et de logement.

Bureau du directeur parlementaire du budget et Société canadienne d’hypothèques et de logement.

Incidence financière

Le gouvernement finance ses achats d’OHC au moyen d’emprunts fédéraux. Chaque achat fait croître la quantité d’actifs et de passifs du gouvernement du même montant, ce qui ne change rien à la dette publique nette, mais qui fait augmenter la dette publique brute[^2].

Les OHC ont un rendement supérieur à celui des obligations comparables du gouvernement du Canada, et ce revenu supplémentaire est ce qui amène les investisseurs à détenir ces titres relativement moins liquides[^3]. Comme le gouvernement conserve ses OHC jusqu’à leur échéance, il profite de cet excédent. Le risque bancaire lié aux OHC est équivalent à celui lié aux obligations du gouvernement du Canada, puisque la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) garantit le paiement des intérêts et du principal.

Par souci de simplicité, dans la présente analyse, nous sommes partis de l’hypothèse que le gouvernement utilise une stratégie fondée sur la congruence des échéances[^4]. Par exemple, il émettra des obligations à 5 ans pour financer l’achat d’OHC à 5 ans. L’incidence financière (le revenu net généré) dépend donc de la taille et de la durée des obligations acquises. Comme le gouvernement a annoncé son intention d’acheter pour un maximum de 30 milliards d’obligations chaque année, la taille de son portefeuille d’OHC augmentera jusqu’à ce que les obligations viennent à échéance. Par conséquent, une augmentation (ou une baisse) d’un point de base du rendement moyen du portefeuille du gouvernement aura un effet cumulatif à moyen terme lié à la croissance du nombre d’OHC (voir la figure 2).

Nous avons aussi supposé que le gouvernement utilisera le montant des OHC venus à échéance pour rembourser les emprunts qu’il a contractés pour financer l’achat d’OHC. La présente analyse repose sur l’hypothèse que le gouvernement maintiendra le volume de ses achats d’obligations à 5 ans et à 10 ans jusqu’à la fin de 2025, ce qui représente respectivement des dépenses de 4,25 milliards et de 3 milliards pour les deux trimestres restants. Nous avons également supposé qu’au-delà de 2025, le gouvernement consacrera chaque année 15 milliards à l’achat d’OHC à 5 ans et 15 milliards à l’achat d’OHC à 10 ans. Selon ces hypothèses, en 2030-2031, la valeur des OHC détenues par le gouvernement devrait avoir atteint 179,3 milliards de dollars et la dette publique brute devrait avoir augmenté du même montant.

0510152020232024202520262027202820292030Incidence d'une hausse d'unpoint de base sur le rendement
Incidence financière d’une hausse d’un point de base dans l’écart de rendement des OHC (en millions de dollars)

Bureau du directeur parlementaire du budget.

Bureau du directeur parlementaire du budget.

Les années correspondent aux exercices financiers (2024 correspond à l’exercice 2024-2025). Une baisse d’un point de base dans l’écart de rendement des OHC aurait une incidence financière négative du même ordre.

Depuis le début des achats d’OHC par le gouvernement en février 2024, les écarts de rendement à la date d’émission sont passés de 24,0 à 15,0 points de base pour les OHC à 5 ans, et de 39,5 à 32,0 points de base pour les OHC à 10 ans. Il convient toutefois de noter que la tendance à la baisse des écarts de rendement n’a pas été constante (voir la figure 3).

010203040502024-12024-22024-32024-42024-52024-62024-72024-82024-92024-102024-112024-122025-12025-22025-32025-42025-52025-62025-72025-82025-9Rendement des OHC à 5 ansRendement des OHC à 10 ans
Écarts de rendement entre les OHC à 5 ans et à 10 ans et les obligations du gouvernement du Canada correspondantes (en points de base)

Bureau du directeur parlementaire du budget et Banque du Canada.

Bureau du directeur parlementaire du budget et Banque du Canada.

Ces écarts représentent la différence entre les OHC et les obligations de référence correspondantes du gouvernement du Canada à la date de mise en circulation des OHC.

Le rétrécissement des écarts de rendement a fait diminuer les revenus nets provenant des achats d’OHC, mais on ne peut prédire avec certitude la façon dont la situation évoluera. Par conséquent, conformément à nos Perspectives économiques et financières de septembre 2025 fondées sur le statu quo, nous avons analysé trois scénarios pour déterminer l’incidence financière à moyen terme des achats d’OHC par le gouvernement (voir la figure 4)[^5] :

  • Scénario de référence : Les écarts de rendement des OHC se maintiendront aux niveaux observés au moment du dernier achat d’OHC[^6];

  • Scénario pessimiste : Les écarts de rendement des OHC continueront de baisser au rythme observé depuis février 2024[^7];

  • Scénario optimiste : Les écarts de rendement des OHC feront une remontée pour atteindre la moyenne historique observée entre juillet 2015 et juillet 2025[^8].

010020030040050020232024202520262027202820292030Scénario optimisteScénario de référenceScénario pessimiste
Incidence financière des achats d’OHC selon divers scénarios d’évolution des écarts de rendement (en millions de dollars)

Bureau du directeur parlementaire du budget et Société canadienne d’hypothèques et de logement.

Bureau du directeur parlementaire du budget et Société canadienne d’hypothèques et de logement.

Les années correspondent aux exercices financiers (2024 correspond à l’exercice 2024-2025). Les données pour les exercices 2023-2024 et 2024‑2025 sont des estimations. La période de projection s’étend des exercices 2025-2026 à 2030-2031.

Dans chaque scénario, le gouvernement génère des revenus nets chaque année. En 2030‑2031, les revenus nets projetés sont établis à 509,7 millions de dollars dans le scénario optimiste, à 464,7 millions de dollars dans le scénario de référence et à 353,4 millions de dollars dans le scénario pessimiste. Dans l’Énoncé économique de l’automne 2023, le gouvernement prévoyait que l’achat d’OHC générerait des revenus nets de 596,0 millions de dollars en 2028‑2029; notre estimation selon le scénario optimiste s’élève à 392,5 millions de dollars[^9].

Bien que le gouvernement puisse augmenter la quantité de ses achats (soit en maintenant, soit en rehaussant le plafond des émissions obligataires) pour générer plus de revenus, les paramètres du programme ont été fixés à la suite de consultations auprès des opérateurs pour préserver l’intégrité du marché des OHC. Une expansion du programme pourrait ébranler la fonction des OHC comme mécanisme de gestion des risques fondé sur le marché. De plus, si le nombre d’OHC émis augmentait, il pourrait manquer de titres admissibles en vertu de la Loi nationale sur l’habitation pour une émission donnée. En outre, une hausse de la demande du gouvernement pourrait faire rétrécir encore davantage l’écart de rendement.

L’incidence financière finale du programme des OHC ne dépendra pas seulement de cet écart, mais aussi des autres conditions du marché et des taux d’intérêt. On prévoit que la dette publique brute découlant de l’émission d’obligations pour financer l’achat d’OHC augmentera de 30 milliards de dollars par année, pour atteindre 179,3 milliards en 2030-2031, ou 7,6 % per cent de la dette fédérale négociable non amortie[^10]. Ces obligations supplémentaires pourraient exercer une pression sur l’ensemble des coûts d’emprunt du gouvernement et faire diminuer ou disparaître ses revenus nets [^11]. Les analyses de marché et les données du marché des swaps portent à croire qu’une hausse des emprunts pourrait produire sur la courbe de l’écart de rendement un effet semblable aux conséquences financières et à l’impact sur les marchés causés par une hausse des émissions d’obligations.

De plus, comme la durée des obligations que le gouvernement achète est plus longue que celle des obligations qu’il émet (dont une bonne part sont des obligations à court terme, comme des bons du Trésor ou des obligations à 2 ans)[^12], le gouvernement risque de payer des taux d’intérêt à court terme plus élevés qui pourraient faire diminuer ou disparaître les revenus provenant des achats d’OHC[^13].

Annexe

Le processus de titrisation

La création des OHC se fait par le processus de la titrisation. La titrisation permet à son initiateur (une banque, par exemple) de regrouper des actifs qui génèrent un revenu (des prêts hypothécaires, par exemple) dans un portefeuille de référence en vue de les transformer en titres de créance vendus à des investisseurs pour se financer. Les titres sont adossés au revenu généré par les actifs du portefeuille. Ce processus transforme des actifs non liquides en titres liquides et transfère le risque bancaire.

On peut faire intervenir un intermédiaire (la Fiducie du Canada pour l’habitation (FCH), par exemple) dans le processus. La distance juridique créée par cet intermédiaire protège les actifs du portefeuille dans l’éventualité où l’initiateur aurait des difficultés financières. Il arrive couramment que l’initiateur continue de gérer les actifs du portefeuille[^14].

La titrisation profite aux initiateurs et aux investisseurs. Elle permet aux initiateurs de mettre à profit des ressources qui auraient autrement été immobilisées dans les actifs du portefeuille pour étendre leurs activités dans une mesure qui n’aurait pas été possible autrement.

La titrisation peut aussi atténuer les coûts d’emprunt des initiateurs dont la cote de crédit est plus faible que celle des actifs. Elle facilite en outre le transfert aux investisseurs du risque bancaire lié au portefeuille.

Quant aux investisseurs, la titrisation les expose à une gamme d’actifs plus variée que celle à laquelle ils auraient normalement accès. Par exemple, peu d’investisseurs peuvent se permettre une participation directe et diversifiée au marché hypothécaire, vu la taille des actifs individuels. La titrisation permet également aux investisseurs de prendre les risques que la composition de leur propre portefeuille leur permet de mieux assumer.

Le cycle de vie d’une OHC

Le processus de création d’une OHC commence par l’obtention de prêts hypothécaires pour l’achat de propriétés unifamiliales, d’immeubles d’habitation ou de propriétés de logement social, qui sont ensuite assurés. Les prêts hypothécaires sont regroupés dans des titres hypothécaires émis en vertu de la Loi nationale sur l’habitation (TH LNH).

Un TH LNH doit remplir plusieurs critères pour pouvoir être intégré à une nouvelle OHC : 1) les prêts hypothécaires sous-jacents doivent être pleinement assurés par un assureur hypothécaire admissible; 2) les prêts hypothécaires sous-jacents doivent venir à échéance au plus tard à la date d’échéance de l’OHC; 3) les TH LNH doivent être conformes aux exigences réglementaires en matière de structure et de garanties[^15]. Les TH LNH admissibles peuvent être vendus à la Fiducie du Canada pour l’habitation (FCH), qui émet les OHC. La taille d’une émission d’OHC ne peut pas être supérieure à la provision de TH LNH admissibles.

Pour déterminer la taille et les caractéristiques de chaque émission d’OHC, la FCH et ses conseillers en services financiers évaluent la demande du marché et tiennent compte de la quantité de TH LNH admissibles. Une fois fixées les caractéristiques d’une émission d’OHC donnée, les acquéreurs d’OHC (dont le gouvernement, qui achète les OHC par l’intermédiaire de son agent financier : la Banque du Canada) deviennent des preneurs de prix. Depuis janvier 2015, toutes les émissions d’OHC et les réouvertures d’émissions ont été entièrement souscrites, ce qui signifie que le montant proposé pour l’acquisition des OHC a égalé ou dépassé le montant de l’émission provenant de la FCH.

La FCH établit ensuite plusieurs accords pour faciliter la création de l’OHC. Le premier accord vise à confirmer que la SCHL accepte de garantir le paiement périodique des montants que la FCH versera aux investisseurs.

La FCH prépare aussi une série d’accords de swap. Ces accords permettent de convertir les paiements mensuels sur les TH LNH dans une mesure qui correspond aux versements de coupons et aux paiements du principal associés à l’OHC. Pour les OHC à taux fixe qu’il achète, le gouvernement encaisse des intérêts semestriels et reçoit le remboursement intégral du principal à la date d’échéance de l’obligation. Les revenus provenant des TH LNH sont réinvestis dans d’autres actifs admissibles; une partie des fonds est consacrée au paiement du coupon, et le reste au remboursement de la valeur nominale de l’OHC venue à échéance.

Lorsque la FCH a déterminé la demande du marché et établi les accords nécessaires à l’émission d’OHC, elle peut commencer la vente des OHC aux investisseurs; elle utilise simultanément les fonds pour faire l’acquisition des TH LNH admissible et pour conclure les accords de garantie et de swap avec les parties prenantes. Les investisseurs peuvent détenir les OHC jusqu’à leur date d’échéance ou les vendre ultérieurement sur le marché secondaire.

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